Lettre ouverte à François Hollande

Publié le par agence com vous

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Monsieur le Député,

 

Vous vous êtes adressé aux Français dans les colonnes du journal Libération le 3 janvier dernier dans une tribune intitulée « le changement, c’est maintenant ». J’ai pris connaissance de celle-ci et me permets donc de vous faire part de mon sentiment, au nom de notre mouvement, plus particulièrement au sujet de la jeunesse et du droit à entreprendre dans notre pays. 

 

Je cite vos propos « La justice, c’est une société qui fait place à sa jeunesse. L’espérance : je veux retrouver le rêve français. Celui qui permet à la génération qui vient de mieux vivre que la nôtre. Celui qui transmet le flambeau du progrès à la jeunesse impatiente, celui qui donne à la Nation sa fierté d’avancer, de dépasser ses intérêts et ses catégories d’âge et de classes pour se donner un destin commun, qui nous élève et nous rassemble. Cette espérance n’est pas vaine. Elle est le fil qui renoue le récit républicain ».

 

Naturellement, on ne peut que partager votre ambition mais est-elle tout à fait en cohérence avec vos propos sur l’emploi en général et sur le régime de l’auto entreprise en particulier ? Vous qui souhaitez revoir ce dispositif comme vous l’avez annoncé au micro de BFM lors d’une interview de Jean Jacques Bourdin. Je m’interroge singulièrement sur l’avenir des quelques 162.000 jeunes qui ont choisi de lancer leur micro structure.

 

Vous dites vouloir limiter ce statut dans le temps, c’est déjà renoncer à une politique en faveur de la jeunesse. En effet, la plupart des lycéens et des étudiants travaillent sur des études de cas d’entreprises qui ont été extraits de la réalité par le corps enseignant afin de les former à différents enjeux et leur donner les outils nécessaires pour affronter plus tard les situations du monde professionnel. Nous pensons donc que favoriser la création d’auto entreprises auprès des jeunes améliore leur employabilité. Elle permet également d’éprouver une innovation et de tester un « business model » que les études de cas factices ont pu révéler ou encourager.

 

Elle donne la valeur du travail et de la rémunération et peut aider à financer leurs études, à démarrer les cotisations dès l’école du fait des carrières désormais longues et du départ en retraite plus tardif. Et tout simplement de valider un parcours d’entrepreneur et pourquoi pas de le rester.

 

La création d’une micro structure est avant tout un modèle de croissance et de pédagogie enviable en temps de crise, pour les étudiants, pour les parents, pour les établissements d’études supérieures et pour notre économie. Vouloir la limiter dans le temps, c’est tuer dans l’œuf, le développement de la jeunesse. C’est aussi penser et faire croire que l’Etat peut tout en matière d’emploi et d’éducation alors que nos moyens sont extrêmement limités. 

 

J’ajouterai à cela que pour se prononcer sur la viabilité d’une entreprise, le délai de lancement doit être suffisamment assez long pour assurer sa pérennité. Votre proposition est donc inadaptée à la réalité.

 

Plus globalement, vous souhaitez revoir ce régime sans pour autant avancer de propositions claires et précises sur le fond comme sur la forme. Cela laisse-t-il augurer que les associations représentatives ne seront pas consultées ? Que déjà, dans les cartons, une série de mesures est en sommeil pour mieux ressurgir et étouffer ce que l’on peut désormais considérer comme un véritable modèle économique ? J’ose croire que non.

 

Monsieur le Député, c’est bien connu : les auto-entrepreneurs sont des voleurs…qui volent au secours d’une économie en crise. Si je force le trait avec un humour, jouant de la dérision, c’est parce que nous avons fait l’objet d’une véritable campagne de dénigrement tout au long du dernier trimestre 2011.

 

Quelques parlementaires se sont essayés à coups d’amendements et de projets de loi à détricoter un régime que nous attendions tous et qui trouva sa parfaite traduction législative en 2009, grâce à la détermination du Ministre Hervé Novelli. Celui-ci paracheva un processus intellectuel engagé depuis longue date, s’appuyant notamment sur la simplification des formalités de création et de gestion.

 

La « bulle » Internet a largement contribué à la réussite de ce qu’il convient désormais de considérer comme un véritable modèle économique. Plébiscité par près 1.000.000 personnes, il a généré près de 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires et près de 600 millions d’euros de recettes fiscales pour l’Etat. Une véritable aubaine pour mettre un terme, du moins lutter puissamment contre « l’économie souterraine » et dégager une nouvelle productivité. 

 

Cette richesse ne pourra pas être créée par les seuls emplois publics que vous voulez porter si vous accédez à la magistrature suprême. Et nous savons là aussi que les marges de manœuvre sont réduites pour augmenter le pouvoir d’achat des Français.

 

Regardons la réalité en face ! pourquoi voudrait-on, pèle mêle, faire contrôler les auto-entreprises par des organismes de gestion agréés au détriment du rôle de régulateur et de « gendarme » que doit exercer l’URSSAF ; pourquoi voudrait-on limiter le régime dans le temps alors que ces activités auto-entrepreneuriales couvrent des besoins économiques , pourquoi voudrait-on décourager celles et ceux qui consacrent quelques heures par semaine sur leur temps libre pour se dégager quelques revenus qui abondent le pouvoir d’achat, nécessaire à la consommation ; moteur de la croissance ?

 

Sans doute pour « faire vibrer » les sanglots longs des violons de la mauvaise concurrence, de la fraude, du travail dissimulé et de la précarité organisée et légalisée...

 

A l’heure où notre pays recherche ce qui fait sens, ce qui fait cohésion, l’auto-entreprise est pour nous la solution la mieux adaptée :

• pour lutter contre le chômage, 

• pour encourager le lien social et le dialogue entre les générations, 

• le partage de l’expérience entre les jeunes actifs et les séniors, 

• pour ouvrir l’université à l’expérience entrepreneuriale, 

• pour franchir un échelon vers le marché de l’emploi européen, pour augmenter les salaires des employés du public comme du privé. 

 

Oui, il faut le dire, l’auto-entreprise, c’est la solution anti-crise. Et nous aimerions à ce titre qu’elle essaime partout en Europe afin qu’elle sorte le vieux continent de son marasme économique et financier.

 

Monsieur le Député, le rêve français, c’est de rétablir le plein emploi. Renouer le récit républicain, c’est d’inverser la tendance et de permettre au secteur privé d’embaucher. Au secteur public d’être novateur et performant. Pas de condamner celles et ceux qui contribuent à libérer les énergies et les talents en France !

 

Comme vous le dites dans votre tribune « la volonté, il en faudra pour rétablir les comptes publics, pour relancer la croissance, pour soutenir les emplois. Il en faudra pour redonner confiance aux entrepreneurs, aux salariés, aux fonctionnaires, aux chercheurs… » Oui il en faudra, mais pas à n’importe quel prix. Et encore moins en sabordant demain ce qui a été fait hier pour le seul plaisir de démonter un mécano politique qui n’était pas le vôtre.

 

Dans l’attente d’échanger sur ce sujet que vous comprendrez crucial pour nous, je vous prie de recevoir, Monsieur le Député, mes respectueuses salutations.

 

Cyrille DARRIGADE

Président du Mouvement des Autoentrepreneurs de France

 

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